TYPE ET HORS TYPE : Partie 3 publié dans la revue du club de race 2015
Des deux volets précédents, il ressort que la fonction utilitaire reste un déterminant important à la formation d’une race. Oublier cet objectif c’est perdre, génération après génération, ce pour quoi une race est comme elle est. On a coutume d’entendre qu’une modification du type est inévitable, les races évoluent… Pas faux mais pourquoi évoluent t’elles ? Quel environnement les fait-elles évoluer ? Y a t’il une corrélation avec la perversion des exposition canines où même la volonté de bien faire se fait laminer par l’attente des participants ? On peut le constater, sur ces dernières années, le principal moteur de l’évolution d’une race comme la nôtre est l ‘exposition canine. Sa nouvelle fonction est d’être un chien d’apparence, un chien de show, un chien statique. Un chien jugé sur un standard de chien utilitaire mais en statique et sur une occlusion.
Il faut maintenir une certaine capacité au travail. Cela passe évidemment par le travail mais aussi et surtout des apports divers et variés qui maintiennent un certain influx nerveux et sa réponse aux sollicitations : Conditions de vie, des mises en situations, la nourriture, son rapport avec son maître, son environnement, les soins,… On s’accommode avec l’héritabilité des gènes pour la question somatique moins avec la transmission de la capacité à. On en revient à la fonction utilitaire qui participe à la constitution, à la physiologie et à la morphologie dédiées.
Pour développer cette idée nous allons nous concentrer sur la beauté en zootechnie. Là encore son sens n’est pas celui usuel. G. Solaro disait : « La beauté va au-delà du plaisir sensoriel, cela touche au plaisir intellectuel »
La cynotechnie nous offre plusieurs formes de beautés intéressantes.
Le Pr Cornevin donne cette 1ère subdivision :
Beauté conventionnelle ;
Beauté harmonique ;
Beauté d’adaptation ;
– La beauté conventionnelle est la moins intéressante pour les cynologues car subjective et régie par la mode du moment. C’est cette beauté qui raccourcit ou allongent les museaux de nos cani corsi, bombe leur crâne, adoube l’hypertype, fait régner une certaine coloromanie le noir en ce moment. Elle est le bout de chaîne des dérives engendrées par et pour les expositions canines. Est-elle une fin en soit ou son moteur initiatique ?
– La beauté harmonique est l’équilibre de l’ensemble des régions du chien. Il est évident qu’une tête de cane corso sur un corps de caniche toiletté, heurterait l’oeil.
– La beauté d’adaptation, est quand la structure du chien est entièrement axée vers sa fonction originelle.
En effet, « si l’on devait juger un basset hound du point de vue esthétique, nous devrions conclure qu’un tel chien est laid et dysharmonique, mais d’un point de vue fonctionnelle il deviendrait beau pour le travail auquel il a été destiné » G. Solaro.
En imaginant les rôles tenus par le cane corso, il est théoriquement aisé de visualiser une idée du juste chien.
Cette dernière se heurte de plein fouet avec la première et la dénaturation découlant des show canins.
Pas suffisamment satisfait de cette subdivision Giuseppe Solaro, déclinait la beauté d’adaptation en quatre points.
– La beauté d’adaptation au travail, garde, défense, chasse,…
– La beauté d’adaptation à la production du pelage.
– La beauté d’adaptation à la reproduction
– La beauté d’adaptation à produire de la « viande », en effet, le chien était, pour certaines sociétés, comestible.
Ces subdivisions désormais classiques sont encore de nos jours acceptables. Le Pr Barbieri proposait en complément une autre forme de beauté, la beauté psychique. Partant de ce postulat : A quoi servirait un sujet très bien construit si au premier bruit il se mettait à trembler ou à s’enfuir ?
Beauté psychique : Elle est tirée d’une sorte de beauté fondamentale, considérant que cela définit le caractère d’un animal et son équilibre. Tenant compte que le caractère est un terme générique assez difficile à définir, nous nous tiendrons à ces notions : tempérament, agressivité, tempre, la docilité, la combativité, la vigilance, l’instinct prédateur,…
Pour mieux comprendre et opportunément, voici quelques définitions :
1- Le tempérament est la vélocité et l’intensité de réaction dans un temps donné, conséquemment à un ou des stimulus plaisants ou déplaisants d’une quelconque nature. C’est un ensemble de traits présent dès la naissance d’origines physiologiques et qui déterminent le comportement général.
2- La trempe ou sang froid est la capacité et la durée de la résistance à supporter une stimulation (même désagréable) externe d’une quelconque origine. Un animal peut présenter une bonne résistance physique (fatigue, froid,..) mais une capacité insuffisante aux stimulus émotionnels (coup de feu, bâton, bruits de foule, …)
3- la Docilité est la facilité spontanée à accepter et à reconnaître en l’homme un supérieur hiérarchique sans que celle-ci soit obtenue par la contrainte donnant lieu à une soumission forcée.
4- La vigilance est la capacité d’avertir opportunément des dangers extérieurs autant pour l’animal que pour son maître. La vigilance est étroitement liée la notion de territoire, c’est à dire l’espace que le chien considère être comme le sien que même la socialisation à considérablement réduite perdant ainsi une partie de ses instincts primaires (défense de la nourriture, du cheptel,…)
5- L’agressivité est la première riposte que le chien a la capacité de donner envers une stimulation externe qu’il interprète comme menaçante pour lui, ce qu’il protège ou son territoire.
6- La combativité est la seconde phase de l’agressivité de gestion de l’événement.
7- Le courage est l’affrontement d’un danger malgré les risques. Le courage n’est pas facile à interpréter chez le chien, car il est plus rationnel qu’instinctif.
8- L’instinct est la capacité naturelle innée à accomplir une tâche sans apprentissage. Il peut-être prédateur, reproducteur, de propriété,…
L’étude du comportement canin ayant évolué et étant donné le nombre incroyable de spécialistes du dit comportement que ce soit des comportementalistes (vétérinaires ou non) ou les éducateurs canins improvisés, il apparaît que la plupart ont leurs propres définitions de tout ce qui régit un chien psychologiquement. Volontairement, nous n’avons pas voulu entrer dans le détail de ces subdivisions, tant celles-ci nous paraissent claires et limpides dans l’idée et afin de respecter l’esprit de son rédacteur.
En conclusion et aparté, nous tenons à remercier les lecteurs qui nous ont témoigné beaucoup de sympathie au travers des deux premiers volets comprenant que nous ne rentrerions pas directement dans le vif du sujet avec un énième article sur le type, les défauts,… avec sa recette magique pour la sélection du prochain champion. Mais qui prennent la patience de nous lire et de comprendre que nous plantons un décor quasi philosophique sur ce qu’est l’élevage de chien. Pour les autres, asseyez-vous là, on revient tout de suite, ne bougez pas. Nous remercions aussi l’AFCC, avec qui la relation n’est pas nécessairement un long fleuve tranquille, de nous permettre de nous exprimer librement.
Mr Guitton et Mr Delaitre
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